« Pourquoi... Pourquoi? » Ma mère pleurait à chaudes larmes et je préparais mon sac. J'étais rentré de Yale plus tôt pour faire mon sac et partir sur le terrain militaire. La guerre avait éclaté et j'avais décidé de m'y rendre pour rendre fier mes parents et pour protéger des personnes innocentes, qui n'avaient rien demandé. Mes petites sœurs pleuraient aussi. Mon grand-père était mort lors de la Première Guerre mondiale, depuis la guerre était un sujet sensible dans la famille. Mon père était resté silencieux, il avait juste posé sa main sur mon épaule en me disant de faire attention. « Je t'en prie Adam, ne fait pas ça... » « Maman, il faut que je le fasse. Tu verras, tu seras fier de moi ! » Fis-je avec un sourire avant de déposer un baiser sur sa joue comme pour la rassurer. « Mais, et Winona ? Tu y penses ? Tu vas la laisser toute seule ? » « Je reviendrai maman. » Je ne voulais pas qu'elle sache que je n'éprouvais pas spécialement de sentiments pour cette jeune fille, j'essayais juste de la rassurer comme je pouvais. « Tu nous écriras hein ? Tu n'oublieras pas ? » Je levais les yeux au ciel avant que mon père ne prenne la parole. « Laisse-le un peu Carole. Tu vois bien que c'est un grand gaillard, il ne va pas facilement se laisser plomber ses petites fesses ! » Fit-il avant d'éclater de rire et de me donner une grande tape dans le dos comme il avait l'habitude de faire. Je pris mon sac sur l'épaule. Je donnais un baiser à mes sœurs et une poignée de main à mon frère et je quittais le domicile familiale pour aller au camp. Dans à peine deux semaines je serai loin de la Nouvelle-Orléans. Alors, je regardai chaque moment du paysage pour l'imprégner dans ma mémoire. Voir une dernière fois ce pays qui m'avait vu grandir.

Cela faisait plusieurs que le calme régnait. L'océan était calme et le soleil tapait fort. Le commandement annonça que plusieurs militaires pouvaient prendre une après-midi de repos sur terre. J'étais dans la liste et je marchais sur le sable à la recherche de la petite brunette que j'adorai embêté par moment. Je l'aperçus non loin près des rochers et je m'approcha rapidement. Mes camarades ne comprenaient pas ce que je lui trouvais, et j'avouais que moi non plus je ne comprenais pas comment je pouvais ressentir ce genre de sentiments à son égard. Elle avait l'âge d'une de mes petites sœurs et j'étais fiancé. Je ne disais jamais rien à propos de ça. On passait toute l'après-midi ensemble et je ne pouvais m'empêcher de la taquiner par moment. Alors, à un moment donné elle me demanda si je lui écrirai quand je serai retourné à Yale. « Pour l'instant je n'ai pas besoin de t'écrire, je suis à quelques lieues en mer. » Fis-je avec un sourire. Le soleil se couchait et je voyais mes camarades repartirent vers le bateau en me faisant signe. Je ne voulais pas repartir dessus. Quand j'étais près d'elle, j'oubliais tout ça, cette guerre qui n'allait pas sans doute finir dès le lendemain. Quelques jours auparavant elle avait exposé sa crainte de me voir périr et je l'avais rassuré tant bien que mal. On était ici, dans la tranquillité. Je me levais pour aller rejoindre mes compagnons. « Tu ferais mieux d'aller dormir, les petites filles de ton âge ont besoin de sommeil. » Fis-je en passant le revers de ma main sur sa joue. Je déposais un baiser sur ses lèvres avant de me lever et secouant le sable sur mes vêtements. « Demain, on se voit ? » « Si c'est aussi tranquille, oui. Va dormir, tu ne crains rien. » Je me sauva en accélérant le pas car un de mes camardes était en train de scander mon nom. Je monta sur le bateau, apaisé mais le cauchemar n'était pas encore apparu.
« DEBOUT ! DEBOUT ! » Il faisait nuit et on entendait des bombardiers arrivés. C'était un cauchemar. Je me disais que ce n'était pas possible. J'enfilais en quatrième vitesse mes vêtements et alla sur le pont avant de voir les bombardiers foncés droit sur nous. On allait tous périr. Les mitraillettes commençaient à tirer et je courus sur le pont pour aller à l'autre bout de l'Arizona. C'était mourir sur ce bateau, ou avoir une chance de vivre. Je me sentais un peu lâche sur le coup mais je ne pensais pas qu'à moi dans cette histoire. J'avais fais eux promesses : une à ma mère, une à Frankie. Sentant le bateau qui commençait à tanguer la suite d'une première explosion, je me jetai à l'eau en fermant les yeux. Dans les profondeurs de l'océan, je ne voyais qu'un visage. Celle de ma petite brunette...

En ouvrant les yeux je ne savais plus où j'étais. Je me sentais juste très fatigué. Je vis du mouvement autour de moi, des infirmières et des blessés. Je me redressai un peu sur le lit et tentait de mettre un peu d'ordre dans mes idées. Je vis un gradé militaire venir vers moi. « Au moins, on a eu un survivant dans cette attaque ! » Mes idées étaient embrumées mais je venais de comprendre que personne n'avait survécu, à part moi. L'Arizona avait coulé. Mes camarades étaient morts. Pendant deux jours je gardais le lit pour me reposer et quand je me levais on m'annonça que j'irai en Europe, en renfort des forces alliées. En arrivant en Angleterre, je fis connaissance avec mon nouveau régiment. Je m'étais fais quelques amis et je buvais le soir en jouant aux cartes. Je ne pouvais ce pendant m'empêcher de penser à ma petite brunette. Je me demandais ce qu'elle était devenue, si elle avait survécu à l'attaque de l'île. Plusieurs fois j'avais commencé à rédiger une lettre avant de la déchirer en me disant que cela ne servait à rien, que je ne ferai que grandir ma peine. Un matin, on marchait avec mon régiment en direction d'un village français – on était en France depuis deux semaines – et on entendit des avions arrivés. « A TERRE ! A TERRE ! » Rapidement, on sauta dans les fossées à côté, sa calant le plus possible contre le sol pour éviter les attaques. Les avions passaient et non loin, à l'entrée du village, des soldats ennemis arrivaient. Fusil en main, on se relevait et je soufflais longuement, priant pour m'en sortir. Avant que l'on ait eu le temps de sortir du fossé on entendit un sifflement puis une explosion. De la terre, rien que de la terre. Je vis mes amis allongés à côté de moi, clignant faiblement des yeux, couverts de sang. Une douleur me pulvérisait ma jambe mais je m'en moquais. « Mark ! Mark ! Reste avec moi ! Reste réveillé putain ! » Je lui mis quelques claques sur ses joues, avec un regard apeuré. Mark me sourit une dernière fois. « Tu es un type bien. » J'avais les larmes aux yeux et l'âme parti de ses yeux. Je ressentais une rage folle dans mon cœur ainsi qu'une douleur et je voulus me relever de rage fusil en main. Je manqua de tomber plusieurs fois. Avec l'adrénaline je réussis à tuer trois à cinq soldats allemands à la suite avant que mon commandant ne me pris par les épaules pour me faire asseoir. Une autre de nos troupes s'occupaient du reste. « Webber !Ca suffit ! Calmez-vous ! » Sans me rendre compte j'étais en larmes, ma douleur me faisait souffrir, j'étais en sang, il n'y avait que de la terre autour de moi et des cadavres. Puis, je m'évanouis.

« Mon but est avant tout de réduire votre peine. » Fis-je en regardant mon client. Vingt-neuf ans et déjà considéré comme un brillant avocat à l'avenir prometteur. Voilà ce que j'étais devenu. La guerre était fini depuis quatre ans. J'avais achevé mes études de droit et je possédais à présent un bureau dans un des cabinets de la ville. J'aidai les malfrats à avoir moins de pénalité que prévu. Je préférais faire ça que d'aider une mère de famille à protéger ses enfants d'un père violent. Je ne savais pas pourquoi. Mes journées se résumaient beaucoup au travail, le reste à être chez moi et à faire semblant d'aimer un peu ma femme. Je ne l'aimais pas, ce n'était pas de ma faute je n'avais que cette petite brunette d'Hawaii dans la tête. Ce qui était stupide, elle devait être morte dans l'attaque. « Si vous réussissez vous aurez un bénéfice. » Mon sourire s'agrandit à cette discussion, l'argent c'était a peu près la vie. Mon père ne le comprenait pas et on était sans cesse en relation conflictuelle. Il voulait des petits-enfants que j'ai une vie très stable et je le refusais. Je ne m'étais jamais remis de cette guerre. J'avais eu des mois, voir une année de rééducation et j'avais perdu des amis très chers. Avant de rentrer j'étais allé voir la famille de Mark en m'excusant, mais ils ne m'en voulaient pas. J'avais mal pour eux. En revenant à Los Angeles je m'étais rendu compte que je ne voulais pas de ma fiancée, mais je m'étais résolu quand même à l'épouser. Il me manque quelque chose, quelque chose pour que mes tourments soient apaisées. Et cette personne je sais que je ne la reverrais plus...